__» Lis tes râtures ;.

Les étoiles en toile de fond illuminaient notre nuit. Drôle de pénombre pour celui qui partageait mes rêves.
L'obscurité était ta vie, la nuit était tes jours. Les couleurs étaient pour toi des illusions, et mes allusions à ces illusions te faisaient mal.
Tes cheveux étaient un présage, sans doute aussi un hommage à la couleur des ténèbres. Et que dire de tes yeux, grisés, comme tu l'étais de la vie.
Cassandre, tel était ton suffixe. Car tu étais aveugle, avant d'être toi-même.
Cassandre n'avait jamais vu, mais voyait toujours ce qu'il se passait dans mon coeur. Tu démèlais les noeuds de mon âme avec l'aisance d'un funambule sur sa corde suspendue.
Mais il me disait toujours, sarcastique, qu'il était aberrant d'imaginer un aveugle en funambule.Tu me parlais de la vie, et je te parlais de la Vie.
Des tons que prennent les feuilles en automne, les couleurs pâles d'un ciel d'hiver, le vert tendre d'une jeune pousse printanière et la radiance dorée du soleil d'été...
Cassandre voyait le monde avec fantaisie, avec frénésie. Tu voyais le monde comme personne ne le voyait. Cassandre voyait le monde avec des mots, des sons, des goûts,...
Tu disais que j'étais unique, parce mes mots étaient tendres, parce que ma voix était douce, parce que mes lèvres étaient sucrées. Nous passions des après-midis à dialoguer, couchés dans l'herbe, les yeux tournés vers le ciel. Je te parlais de ton visage,de ton corps, si parfaits. Nous nous touchions souvent. Je te décrivais les nuages. Nous y étions souvent.
Nous nous complétions, je pense. Tes cheveux de jais détonaient sur mes boucles dorées comme détonait ta maturité sur ma candeur. Tes mots étaient forts, comme l'étaient mes sentiments.
Tes regards, pleins de mystères et de promesses me faisaient oublier mon quotidien auprès de gens voyants qui ne voyait rien.
Avec toi, il fallait voir plus loin que les apparences ou les préjugés. Chaque chose avait une raison d'être. Je crois bien que tu étais la mienne.
Car il faut dire que tu ne faisais rien pour plaire au monde, empacter comme tu l'étais dans tes tenues sombres, le visage orgueilleux et sévère. Tu ne faisais pas tes seize ans.
S'il fallait que tu recouvres la vue, tu ne me reconnaîtrais pas. A vrai dire, tu ne m'as jamais vraiment vue...

A vrai dire, comment expliquer cette attirance ?
Nous, les garçons, nous sommes censés penser au physique, aux jolies rondeurs bien placées,...
Moi, un garçon, je la voyais dans les sourires qui transperçaient son rire, dans les larmes qui traversaient ses sanglots. Oh oui, j’en voyais des rondeurs...Celles de son coeur, grand comme ça. Celles de son innocence étaient elles aussi magnifiques ! Et que dire de sa générosité, son intelligence, sa rapidité d’esprit, son altruisme, son ...
Comment savoir si on est normal là où vos semblables pensent : fesses, seins et que vous pensez : caractère, mental ? A vrai dire, à ne rien voir, on finit par en voir beaucoup...
Elle était lumière, et je pensais sérieusement être son ombre ! Je mourrai d'envie d’être son ombre, fidèle et complice. Etre là, éternellement, pour veiller sur elle. Mais à vrai dire, je souhaitais plus que ça pour elle.Elle méritait un chevalier servant voyant arrivé les ennuis de loin...
Comment voir si elle vous aime ? Là ou d’autres voient ses joues se teinter d’une jolie couleur rougeâtre, je n’en comprenais même pas les termes. On m’aurait dit qu’elle avait des cheveux mauves et une peau verte, je n’en aurai pas tenu compte. Là ou d’autres la verraient se tordre les doigts nerveusement à chacuns de mes rapprochements, je ne voyais que le néant.
Enfin presque. Elle me faisait voir tellement loin, m’emmenait dans des contrées inviolées, superbes. Il faut dire qu’elle était douée, lançant ses mots , passionnée, comme s’élançait un cheval au galop. J’étais sur son dos et elle me baladait dans son monde. Son monde ou le printemps succédait l’hiver, et où le printemps cédait sa place aux dorures du soleil d’été, suivit tendrement par l’embarras des feuilles d’automnes qui rougissaient de plaisir et virevoltaient gracieusement au gré des avances du vent frais qui amenaient les terriblement timides flocons à redescendre sur le sol, dans une danse majestueuse de beauté.
Je les voyais presque, ces flocons. Comme parfois je percevais la chaleur de ses sourires aux moments où notre complicité atteignait son maximum.
Dans mon univers impersonnel et sombre, elle était une fenêtre ouverte sur le monde, et de cette fenêtre, un intense rayon de soleil me transperçait le coeur.
Si seulement un jour, on me donnait la chance de pouvoir la voir ! Si seulement ...